Assurances, Article 1074.2 c.c.q, Projet de loi 16 - Où en sommes-nous avec la réforme du droit de la copropriété?
Revue CopropriétéPLUS, Été 2019
Dans les éditions précédentes de la chronique Point de Mire, je vous ai entretenus sur le Projet de loi 1411 qui fut adopté le 13 juin 2018 et dont les dispositions sont entrées en vigueur le 13 décembre dernier2.
Pour le moment, les changements se font surtout sentir en matière d’assurances de copropriété. Tout syndicat ayant, depuis cette date, subi un sinistre découlant du fait d’un copropriétaire et/ou de ses biens, ou de ceux d’un occupant de son unité en sait quelque chose.
L’article 1074.2 C.c.Q. et le recouvrement des franchises d’assurance
On se souviendra qu’avant le 13 décembre 2018, le syndicat avait l’obligation de dénoncer et de présenter une réclamation à son assureur en cas de sinistre3.
Quoique l’obligation de dénonciation du syndicat subsiste, ce dernier, depuis cette date, est autorisé à se prévaloir, ou pas, de sa couverture assurance de biens. C’est donc dire qu’il peut choisir de ne pas présenter de réclamation à son assureur.
Toutefois, aux termes des dispositions du nouvel article 1074.1 C.c.Q., si le syndicat choisit de ne pas se prévaloir de son assurance :
• il devra voir avec diligence à la réparation des dommages causés aux biens assurés (parties privatives et communes) ; et
• il ne pourra poursuivre les personnes suivantes pour les dommages pour lesquels, autrement, il aurait été indemnisé par cette assurance, à savoir : un copropriétaire, une personne qui fait partie de la maison d’un copropriétaire, une personne à l’égard de laquelle le syndicat est tenu de souscrire une assurance en couvrant la responsabilité.
Concernant les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises d’assurance et/ou pour la réparation du préjudice occasionné aux biens, les dispositions du nouvel article 1074.2 C.c.Q. prévoient ce qui suit :
« Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que par leur contribution aux charges communes, sous réserve des dommages-intérêts qu’il peut obtenir du copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par sa faute.
Est réputée non écrite toute stipulation qui déroge aux dispositions du premier alinéa. » [nos soulignés]
Les conséquences concrètes de l’entrée en vigueur de cet article n’ont pas tardé à se faire sentir sur le terrain, et si certains syndicats n’avaient pas réalisé l’ampleur du changement apporté, ils en réalisent tristement les très lourdes conséquences dès le premier sinistre causé par un copropriétaire, un de ses biens ou animaux, ou encore par un occupant de son unité.
Depuis le 13 décembre 2018, l’interprétation et l’application que font les assureurs des copropriétaires de cette nouvelle disposition fait en sorte que toutes les réclamations des syndicats de copropriété pour le remboursement d’une franchise d’assurance ou celui des sommes engagées pour la réparation du préjudice occasionné aux biens4 est systématiquement refusée, à moins que le syndicat soit en mesure de prouver une « faute » de leur assuré, le copropriétaire.
Le réflexe presque naturel des syndicats est de répondre que ce n’est pas tellement grave parce que leur déclaration de copropriété contient une ou des dispositions de présomption de responsabilité qui font en sorte que le copropriétaire est tenu responsable des conséquences dommageables résultant de son fait ou de sa faute et/ou celle d’un bien dont il est légalement responsable. Il en est de même pour les dommages causés par son locataire ou l’occupant de son unité.
Or, le dernier alinéa de l’article 1074.2 C.c.Q. prévoit que de telles dispositions de présomption de responsabilité sont, depuis, réputées non écrites, ce qui fait en sorte que depuis cette date, les syndicats ont l’obligation et le fardeau de prouver la faute du copropriétaire s’ils veulent pouvoir recouvrer les montants déboursés pour la franchise d’assurance ou la réparation du préjudice aux biens.
Nous conviendrons tous que ce n’est pas chose facile pour le syndicat de faire une telle preuve de faute. D’une part, il est plutôt rare que le syndicat et/ou le conseil d’administration et/ou un administrateur soient présents au moment et sur le lieu où se produit, où débute un sinistre. Le syndicat, avec ou sans le concours de son propre assureur, n’interviendra qu’au moment où le copropriétaire ou l’occupant de l’unité, quand ce n’est pas le copropriétaire de l’étage en dessous, l’aviseront de l’évènement.
Entre le déclenchement de l’évènement et la connaissance et l’intervention du syndicat, il peut s’écouler un temps précieux ; mais surtout, des indices ou des informations essentielles pour la suite du traitement du volet « administratif et judiciaire5 » du dossier de réclamation peuvent se perdre.
Est-ce à dire que dorénavant, afin d’être en mesure de pouvoir se faire rembourser sa franchise, le syndicat devrait immédiatement mandater un expert en sinistres, aussitôt qu’il est informé d’un évènement, d’un sinistre, et ce afin que celui-ci fasse enquête et recueille tous les indices, informations et éléments de preuve qui lui permettront de déterminer l’origine ou la cause exacte du sinistre dans le but, ultimement, d’augmenter les chances du syndicat de pouvoir faire la preuve de la faute du copropriétaire ? À quels coûts ? Est-ce que les coûts de la détermination de la cause réelle du sinistre et de l’identification du responsable ne risquent pas, en fin de course, de rendre vain ou peu utile l’exercice de recouvrement du montant de la franchise d’assurance ?
Et même en ce faisant, il peut arriver que l’opinion d’un expert en sinistres soit à l’opposé de celle d’un autre expert en sinistres. Une fois de plus, dans un tel cas, c’est le syndicat qui devra faire la preuve, par prépondérance, que c’est l’opinion de son expert en sinistres qui est celle à retenir, et que le sinistre origine bel et bien d’un comportement fautif du copropriétaire.
De par l’interprétation et l’application qui est faite de l’article 1074.2 C.c.Q., est d’emblée écarté le recouvrement d’une franchise d’assurance encourue en raison d’un sinistre émanant d’une unité occupée par un locataire ou un tiers occupant : le copropriétaire ne demeurant pas sur place, il sera plutôt difficile de prétendre et de prouver, avec succès, qu’il ait pu commettre une faute qui a occasionné lesdits dommages.
Mais il y a pire. La plupart du temps, on écarte également le recouvrement de la franchise d’assurance pour un dommage occasionné par l’animal du copropriétaire. Ainsi, si le minou a fait ses besoins un peu partout dans l’unité, causant des dommages aux parties communes et aux unités adjacentes, c’est probablement parce qu’il est a des problèmes de santé. Le fait qu’il puisse être malade ou âgé ne constitue pas une faute du copropriétaire. Serait-on rendus à exiger du syndicat, afin de pouvoir recouvrer sa franchise d’assurance de 25 000.00$, qu’il fasse réaliser une expertise médicale sur le chat ? Parce qu’ultimement, le fardeau de prouver la faute incombe au syndicat. Comment le syndicat fera-t-il la preuve d’une faute du copropriétaire dans la garde de son animal ?
La situation est la même pour les dommages occasionnés par les biens. Que la perte origine du lave-vaisselle, du distributeur à glaçons du congélateur, du réservoir d’eau chaude, du cabinet de toilette, il faudra que le syndicat prouve une faute du copropriétaire dans la garde et l’entretien de son bien pour qu’il puisse être indemnisé pour sa franchise d’assurance par l’assureur de celui-ci.
Les refus sont systématiques et les dossiers de réclamation de franchise d’assurances s’empilent sur les bureaux des avocats. La situation est à ce point ridicule, et disons-le, navrante, que des syndicats sont obligés de mandater un avocat(e) pour la préparation et la signification d’une mise en demeure à leur copropriétaire, à la connaissance, voire à la demande de celui-ci, et ce uniquement afin de faire bouger son assureur qui, nonobstant son aveu de responsabilité, refuse et/ou néglige quand même de rembourser la franchise d’assurance au syndicat, obligeant ainsi l’ensemble des autres copropriétaires non concernés d’encourir des honoraires professionnels inutilement !
Pendant ce temps, le syndicat ne peut attendre. Il n’a pas le choix : il doit faire exécuter les travaux de réparation du bien, les dispositions de l’article 1074.1 C.c.Q. le lui imposent.
Depuis le 13 décembre 2018, les syndicats sont en quelque sorte devenus leurs propres assureurs. Ils devront prévoir des montants suffisants pour être en mesure de pouvoir assumer la ou les franchises d’assurance ou les coûts des travaux de remise en état des parties privatives et communes affectées par un ou des sinistres, et ce jusqu’à un éventuel recouvrement de ces montants ; ils devront faire réaliser les travaux de remise en état sans tarder ; ils devront la plupart du temps se résoudre à intenter des procédures judiciaires afin de tenter de convaincre un tribunal de la responsabilité du copropriétaire assuré pour les dommages subis, afin de pouvoir éventuellement récupérer le(s) montant(s) des franchises.
La majorité des franchises d’assurance étant inférieures à 85 000.00$, montant maximum du seuil de compétence de la Cour du Québec, la plupart des dossiers de réclamation seront présentés devant cette instance.
Or, dans le district de Montréal, le délai pour être entendu présentement varie entre 16 et 18 mois. Etre « entendu » ne signifie pas obtenir un jugement, ce qui peut représenter quelques semaines, voire quelques mois de plus. Etre « entendu » n’équivaut pas à recevoir le remboursement demandé ou faire exécuter le jugement qui pourrait avoir été rendu en faveur du syndicat.
Conséquemment, il peut facilement s’écouler 1 an et demi à 2 ans avant que le syndicat puisse éventuellement pouvoir recouvrer le montant de sa franchise d’assurance. Pendant ce temps, combien de franchises d’assurance le syndicat aura-t-il dû assumer à même ses propres fonds? Quel montant doit-il prévoir annuellement afin d’être en mesure de faire face aux effets négatifs de cette modification législative et/ou de l’interprétation qui en est faite par les assureurs ? Combien de cotisations spéciales seront nécessaires afin de garnir ces fonds ?
La réalité étant ce qu’elle est, depuis le 13 décembre 2018, certains syndicats en sont à leur 3ème, certains à leur 4ème sinistre, avec une franchise d’assurance de 25 000.00$. C’est donc dire qu’en moins d’un an, ces syndicats ont assumé 75 000.00$, 100 000.00$ à même les fonds des copropriétaires pour des franchises d’assurance qui, avant le 13 décembre 2018, auraient été assumées par le copropriétaire responsable et/ou son propre assureur.
Si leur tendance se maintient, à ce rythme-là, le temps que la première réclamation de ces syndicats ait été entendue par un tribunal, ils auront dû débourser entre 150 000.00$ à 200 000.00$ uniquement pour les franchises d’assurance ou pour des travaux de remise en état dont le montant est inférieur à leur franchise d’assurance.
Ce sont des conséquences très lourdes et financières très graves, et il est inconcevable que le législateur ait pu souhaiter ou qu’il ait voulu un tel résultat, de telles conséquences pour les syndicats de copropriété et les copropriétaires du Québec.
Il est tout aussi difficile de concevoir que le législateur ait volontairement décidé de déresponsabiliser les copropriétaires, individuellement, pour, en lieu et place, faire supporter un fardeau supplémentaire important à la collectivité des copropriétaires et à l’assureur du syndicat, et ce alors que les syndicats ont redoublé d’efforts dans les dernières années afin de responsabiliser leurs copropriétaires, afin de les informer adéquatement sur leurs obligations, afin de les sensibiliser à la diligence, la prudence et la vigilance nécessaire afin de réduire le nombre de réclamations d’assurance et, par conséquent, réduire la prime d’assurance et les franchises.
Le déséquilibre des responsabilités créé par l’interprétation et l’application des dispositions de l’article 1074.2 C.c.Q., ne peut, en toute logique, être l’effet désiré par le législateur, d’autant plus que le recouvrement des franchises d’assurance n’était pas un grand problème en soi jusqu’en décembre dernier. Par l’adoption de cet article, le législateur n’a pas réglé un problème : il en a créé un majeur.
Dans un contexte social d’engorgement du système judiciaire et de souci et questionnement en lien avec l’accès à la justice, l’intention du législateur était-elle d’encombrer les rôles de la Cour du Québec de réclamations judiciaires pour le remboursement des franchises d’assurance ? Personnellement, j’en doute.
Bien sûr, il existe des modes alternatifs de règlement de différend. On n’a qu’à penser à la médiation et à l’arbitrage, modes de résolution de conflits souvent prévus dans les déclarations de copropriété ou auxquels les parties font appel pour régler leur différend en cas d’absence de clause à ce sujet. Quoique ces modes de résolution de conflits soient de plus en plus utilisés en copropriété vu l’efficacité et la rapidité du processus, il ne faut pas oublier qu’ils ne lient que le syndicat et le copropriétaire.
En l’absence d’un consentement exprès de sa part à cet égard, l’assureur du copropriétaire n’est pas lié par la clause compromissoire6 contenue dans les déclarations de copropriété, et donc pas obligé de participer à un tel processus
Mais il y a plus. Le législateur ne parlant pas pour rien dire, comment concilier le fait qu’il ait prévu que les copropriétaires aient dorénavant l’obligation de contracter une assurance pour leur responsabilité civile alors que de l’autre côté, si l’interprétation et l’application que font les assureurs de l’article 1074.2 C.c.Q. est bonne, une telle assurance ne servirait pratiquement plus compte tenu du refus systématique des réclamations présentées à cet égard ?
Lorsque cette disposition entrera en vigueur, les copropriétaires se trouveront donc à payer :
1. leur quote-part de la prime d’assurance du syndicat (ce qui était le cas avant le 13 décembre 2018) ;
2. leur quote-part des franchises d’assurances du syndicat ou du coût des travaux de remise en état lorsqu’ils sont inférieurs au montant de la franchise d’assurance (ce qui n’était pas le cas avant le 13 décembre 2018) ;
3. leur prime d’assurance (ce qui n’était pas le cas avant l’entrée en vigueur à venir de la disposition à ce sujet, sauf pour les syndicats où la déclaration de copropriété prévoyait déjà une telle obligation).
Dans un contexte où leurs assureurs seront de plus en plus sollicités et que la répartition des indemnisations entre les assureurs du syndicat et ceux des copropriétaires est totalement déséquilibrée, les syndicats de copropriété [lire l’ensemble des copropriétaires] semblent avoir été pris en otage.
D’un côté, l’interprétation qui est faite par les assureurs des copropriétaires des dispositions de l’article 1074.2 C.c.Q. leur impose un fardeau financier inattendu et soudain, un fardeau ni annoncé, ni planifié. De l’autre côté, les dispositions prévues par le législateur quant à la définition de ce que constitue une « franchise raisonnable » (dispositions qui devraient entrer en vigueur dans les prochains mois) auront inévitablement comme conséquence de faire augmenter les primes d’assurance des syndicats.
Devant ce constat déplorable et disons-le, désolant, les voix de plusieurs intervenants du milieu de la copropriété7 se sont jointes afin de sensibiliser la Ministre des affaires municipales et de l’Habitation à cet enjeu d’une grande importance et à ses conséquences financières graves, et lui demander, en collaboration avec son collègue, le Ministre des Finances, d’intervenir et de modifier l’article 1074.2 C.c.Q., ou d’en préciser son interprétation et son application concrète, et ce afin que les dispositions existantes des déclarations de copropriété prévoyant la présomption de responsabilité du copropriétaire puissent continuer de trouver application, et que les copropriétaires, individuellement, soient présumés responsables « de facto » des conséquences dommageables causés par leur fait ou leur faute, et/ou celle d’un animal et/ou d’un bien dont ils sont légalement responsables, ou par le fait ou la faute d’un occupant de leur unité, d’un invité etc. et que les syndicats de copropriété soient indemnisés par les assureurs de ces copropriétaires, comme c’était le cas avant le 13 décembre 2018.
Une pétition à ce sujet fut mise en ligne8. Au moment des consultations sur le projet de loi 16, elle avait recueilli la signature de près de 3 000 copropriétaires.
Il va sans dire que c’est un dossier que je suivrai de près pour vous à la reprise des travaux parlementaires. J’aurai certainement l’occasion de vous en reparler cet automne.
En même temps que s’organisait la démarche de sensibilisation concernant l’article 1074.2 C.c.Q., le Projet de loi 16 intitulé « Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l’amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d’habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal » fut présenté par la Ministre des affaires municipales et de l’habitation.
Ce Projet de loi est présentement rendu à l’étude détaillée, les travaux de la Commission de l’aménagement du territoire ayant eu lieu depuis le 7 mai dernier. Beaucoup d’organismes ont produit un mémoire et/ou se sont fait entendre. La session parlementaire étant maintenant terminée, l’étude de ce Projet de loi continuera probablement à l’automne prochain.
Si ce Projet de loi était adopté tel quel, il constituerait une réforme importante du droit de la copropriété. Voyons de plus près les principales modifications proposées9.
INTRODUCTION DES ARTICLES 1068.1 ET 1068.2 CONCERNANT LES INFORMATIONS A FOURNIR LORS D’UNE VENTE OU ACQUISITION D’UNE FRACTION DE COPROPRIETE
1068.1 : Celui qui vend une fraction de copropriété divise doit remettre au promettant acheteur, qui ne peut y renoncer, l’attestation sur l’état des finances du syndicat et sur l’état de l’immeuble prévue à l’article 1072.2. […].
1068.2 Celui qui promet d’acheter une fraction de copropriété divise peut demander au syndicat des copropriétaires de lui fournir, avec diligence, les renseignements concernant l’immeuble et le syndicat qui sont de nature à lui permettre de donner un consentement éclairé, y compris, le cas échéant, pendant la période durant laquelle il peut se dédire de sa promesse en vertu du deuxième alinéa de l’article 1785.
AMENDEMENT DE L’ARTICLE 1070 ET INTRODUCTION DES ARTICLES 1070.1 ET 1070.2
1070 : Le syndicat tient à la disposition des copropriétaires un registre contenant le nom et l’adresse postale de tous les copropriétaires, locataires et emprunteurs en vertu d’un prêt à usage; ce registre ne peut contenir d’autres renseignements personnels sur ceux-ci, à moins qu’ils n’y consentent expressément. Ce registre contient également les procès-verbaux des assemblées des copropriétaires et du conseil d’administration, les résolutions écrites, le règlement de l’immeuble et ses modifications, ainsi que les états financiers.
Le syndicat tient aussi à la disposition des copropriétaires la déclaration de copropriété, les copies de contrats auxquels il est partie, une copie du plan cadastral, les plans et devis de l’immeuble bâti s’ils sont disponibles, le carnet d’entretien, l’étude du fonds de prévoyance et tous autres documents relatifs à l’immeuble et au syndicat.
Le syndicat tient enfin à la disposition des copropriétaires une description des parties privatives suffisamment précise pour que les améliorations apportées par les copropriétaires soient identifiables. Une même description peut valoir pour plusieurs parties lorsqu’elles présentent les mêmes caractéristiques.
1070.1 La consultation du registre et des documents tenus à la disposition des copropriétaires doit pouvoir se faire en présence d’un administrateur ou d’une personne désignée à cette fin par le conseil d’administration, à des heures raisonnables et selon les modalités prévues par le règlement de l’immeuble. Tout copropriétaire a le droit, moyennant des frais raisonnables, d’obtenir copie du contenu du registre et de ces documents.
Un règlement du gouvernement peut prévoir d’autres documents devant être tenus à la disposition des copropriétaires, ainsi que d’autres conditions, modalités ou limitations relatives à la consultation du registre, des documents devant être tenus à la disposition des copropriétaires et des renseignements qu’ils contiennent.
1070.2 Le syndicat fait établir un carnet d’entretien de l’immeuble, lequel décrit notamment les entretiens faits et à faire. Il tient ce carnet à jour et le fait réviser périodiquement.
La forme, le contenu et les modalités de tenue et de révision du carnet d’entretien, de même que les personnes qui peuvent l’établir, sont déterminés par règlement du gouvernement.
AMENDEMENT DE L’ARTICLE 1071 SUR LE FONDS DE PRÉVOYANCE
1071. Le syndicat constitue, en fonction du coût estimatif des réparations majeures et du coût de remplacement des parties communes, un fonds de prévoyance, en partie liquide, disponible à court terme et dont le capital doit être garanti, affecté uniquement à ces réparations et remplacements. Ce fonds doit être en partie liquide, disponible à court terme et son capital doit être garanti. Il est la propriété du syndicat et son utilisation est déterminée par le conseil d’administration.
Tous les cinq ans, le syndicat obtient une étude du fonds de prévoyance établissant les sommes nécessaires pour que ce fonds soit suffisant pour couvrir le coût estimatif des réparations majeures et de remplacement des parties communes. Cette étude est réalisée par un membre d’un ordre professionnel déterminé par règlement du gouvernement. Ce règlement peut aussi déterminer le contenu et les modalités de l’étude.
Les sommes à verser au fonds de prévoyance sont fixées sur la base des recommandations formulées à l’étude du fonds de prévoyance et en tenant compte de l’évolution de la copropriété, notamment des montants disponibles au fonds de prévoyance.
AJOUT DES ARTICLES 1072.1 ET 1072.2 EN LIEN AVEC LA REMISE D’ATTESTATIONS
1072.1 : Le conseil d’administration doit consulter l’assemblée des copropriétaires avant de décider de toute contribution spéciale aux charges communes.
1072.2 : Le syndicat tient à jour une attestation sur l’état de ses finances et de l’immeuble détenu en copropriété. Il en remet copie, dans un délai de 15 jours et moyennant des frais raisonnables, à tout copropriétaire qui en fait la demande.
Le syndicat n’a l’obligation de tenir à jour une telle attestation qu’à compter du jour de la nomination d’un nouveau conseil d’administration, après la perte de contrôle du promoteur sur le syndicat.
La forme, le contenu et les modalités de cette attestation sont déterminés par règlement du gouvernement.
AJOUT DE L’ARTICLE 1083.1 QUANT AUX PLANS ET DEVIS DÉTENUS PAR LES PROFESSIONNELS DU PROMOTEUR
1083.1 : Le syndicat peut, à ses frais, obtenir les plans et devis de l’immeuble détenus par un architecte ou un ingénieur; celui-ci est tenu de les fournir au syndicat sur demande.
AJOUT DES ARTICLES 1086.1 ET 1086.2 QUANT AUX DÉCISIONS DU CONSEIL D’ADMINISTRATION
1086.1 : Le conseil d’administration doit notifier aux copropriétaires le procès-verbal de toute réunion qu’il tient ou toute résolution écrite qu’il adopte, dans les 30 jours de la réunion ou de l’adoption de la résolution.
1086.2 : Tout copropriétaire ou administrateur peut demander au tribunal d’annuler ou de modifier une décision du conseil d’administration si elle est partiale ou si elle a été prise dans l’intention de nuire aux copropriétaires ou au mépris de leurs droits.
L’action doit, sous peine de déchéance, être intentée dans les 90 jours suivant la décision du conseil d’administration. Le tribunal peut, si l’action est frivole ou vexatoire, condamner le demandeur à des dommages-intérêts.
MODIFICATION DE L’ARTICLE 1089 QUANT AU QUORUM DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
1089 : Le quorum, à l’assemblée, est constitué par les copropriétaires détenant la majorité des voix.
Si le quorum n’est pas atteint, l’assemblée est alors ajournée à une autre date, dont avis est donné à tous les copropriétaires; les trois quarts des membres présents ou représentés à la nouvelle assemblée y constituent le quorum. Cependant, les décisions visées à l’article 1097 ne peuvent être prises à cette nouvelle assemblée que si ces membres représentent au moins la majorité des voix de tous les copropriétaires.
L’assemblée où il n’y a plus quorum doit être ajournée si un copropriétaire le réclame.
MODIFICATION DE L’ARTICLE 1097 QUANT AU NOMBRE DE VOIX NÉCESSAIRES POUR CERTAINES DÉCISIONS
1097 : Sont prises par des copropriétaires, représentant les trois quarts des voix de tous les copropriétaires, présents ou représentés, les décisions qui concernent:
1° Les actes d’acquisition ou d’aliénation immobilière par le syndicat;
2° Les travaux de transformation, d’agrandissement ou d’amélioration des parties communes, ainsi que la répartition du coût de ces travaux et la constitution d’une hypothèque mobilière pour les financer;
3° La construction de bâtiments pour créer de nouvelles fractions;
4° La modification de l’acte constitutif de copropriété ou de l’état descriptif des fractions.
AJOUT D’UN ARTICLE 1102.1 QUANT À LA REMISE DU PROCÈS-VERBAL DE L’ASSEMBLÉE DES COPROPRIÉTAIRES
1102.1 : Le conseil d’administration doit notifier aux copropriétaires le procès-verbal de toute réunion de l’assemblée ou toute résolution écrite adoptée par celle-ci dans les 30 jours de l’assemblée ou de l’adoption de la résolution.
AMENDEMENT DE L’ARTICLE 1103 QUANT AU POUVOIR DU TRIBUNAL DE MODIFIER UNE DÉCISION DE L’ASSEMBLÉE
1103 : Tout copropriétaire peut demander au tribunal d’annuler ou de modifier une décision de l’assemblée si elle est partiale, si elle a été prise dans l’intention de nuire aux copropriétaires ou au mépris de leurs droits, ou encore si une erreur s’est produite dans le calcul des voix.
L’action doit, sous peine de déchéance, être intentée dans les 90 jours de l’assemblée.
Le tribunal peut, si l’action est futile ou vexatoire, condamner le demandeur à des dommages-intérêts.
AJOUT DE L’ARTICLE 1106.1 QUANT AUX DOCUMENTS QUE DOIT TRANSMETTRE LE PROMOTEUR
1106.1 : Dans les 30 jours de l’assemblée extraordinaire, le promoteur doit fournir au syndicat :
1° le carnet d’entretien de l’immeuble et l’étude du fonds de prévoyance;
2° si l’immeuble bâti est neuf, les plans et devis indiquant, le cas échéant, les modifications substantielles qui y ont été apportées pendant la construction par rapport aux plans et devis d’origine;
3°la description des parties privatives prévue à l’article 1070
4° tout autre document ou tout autre renseignement prévu par règlement du gouvernement.
Le promoteur est responsable du préjudice résultant de son défaut de fournir ces documents et ces renseignements.
MODIFICATION DE L’ARTICLE 1791 QUANT AU BUDGET PRÉVISIONNEL VS LE BUDGET RÉEL
1791 : Le budget prévisionnel doit être établi sur une base annuelle d’occupation complète de l’immeuble; dans le cas d’une copropriété divise, il est établi pour une période débutant le jour où la déclaration de copropriété est inscrite.
Le budget comprend, notamment, un état des dettes et des créances, des recettes et débours et des charges communes. Il indique aussi, pour chaque fraction, les impôts fonciers susceptibles d’être dus, le taux de ceux-ci, ainsi que le montant annuel des contributions aux charges communes.
Lorsque les sommes prévues au budget prévisionnel établi par le promoteur pour les exercices financiers pendant lesquels il contrôle le syndicat sont inférieures aux sommes ayant dû être engagées par le syndicat pour le premier exercice financier complet suivant la perte de contrôle du promoteur sur le syndicat, le promoteur doit lui rembourser la différence entre les sommes prévues et les sommes effectivement engagées. Toutefois, il n’y est pas tenu dans la mesure où cette différence est attribuable à des décisions prises par le syndicat à compter du jour de la nomination d’un nouveau conseil d’administration, après la perte de ce contrôle.
MODIFICATION DE L’ARTICLE 1793 QUANT À L’ANNULATION DE LA VENTE DE LA FRACTION DE COPROPRIÉTÉ, L’OBTENTION DE DOMMAGES OU LA DIMINUTION DU PRIX DE VENTE
1793 : La vente d’un immeuble à usage d’habitation qui n’est pas précédée du contrat préliminaire peut être annulée à la demande de l’acheteur, si celui-ci démontre qu’il en subit un préjudice sérieux.
De même, celui qui a acheté une fraction de copropriété et qui n’a pas reçu une note d’information, ou en a reçu une qui comporte des erreurs ou des lacunes, peut, s’il en subit un préjudice sérieux, demander la nullité de la vente et des dommages-intérêts. Cette action doit être intentée dans les 90 jours de la vente et elle peut aussi être intentée par le syndicat à la demande du copropriétaire concerné. Si le copropriétaire préfère que le contrat soit maintenu, il peut demander une réduction de son obligation équivalente aux dommages-intérêts qu’il eût été justifié de réclamer.
Ce qui précède constitue les principales modifications contenues au Projet de loi 16. Nul doute que les consultations privées et publiques et l’étude et analyse de chacune de ses dispositions amènera des amendements à celui-ci. Tel que mentionné plus tôt, la session parlementaire étant terminée, son étude se poursuivra probablement à l’automne.
Bien qu’il puisse être souhaitable que certains sujets soient réglementés et mieux encadrés et qu’on veuille s’assurer que les immeubles en copropriété soient entretenus, on peut certes s’interroger sur les impacts et les conséquences financières qu’aura une telle réforme sur les syndicats de copropriété et sur les copropriétaires, lorsque jumelée aux autres obligations financières déjà existantes : fonds de prévoyance, fonds d’auto-assurance, fonds d’opérations courantes, assumation des franchises d’assurance, coûts pour l’étude du fonds de prévoyance, inspections obligatoires en lien avec les obligations règlementaires, obligations découlant de la Loi 122 et j’en passe.
Les copropriétaires seront-ils en mesure de suivre le rythme ? Si leurs charges financières augmentent, il n’en est pas nécessairement de même de leurs revenus. Que l’on pense aux jeunes couples, aux jeunes acheteurs, aux premiers acheteurs, l’accès à la propriété n’est pas facile. Et ce n’est pas mieux du côté des copropriétaires retraités et de ceux plus âgés : leurs revenus ne sont pas inépuisables; ce sont la plupart du temps des revenus fixes, sans beaucoup de possibilité de pouvoir les augmenter au gré ou en fonction des contributions de plus en plus nombreuses. Est-ce que ces modifications servent les intérêts de ces copropriétaires? La question se pose, la réflexion s’impose.
Il sera donc essentiel, voire crucial, que l’implantation de ces nouvelles obligations, si elles sont adoptées, soit faite progressivement, en tenant compte des autres obligations et de l’échéancier d’entrée en vigueur et de fréquence prévu pour celles-ci, et ce afin que les syndicats et les copropriétaires ne se retrouvent pas du jour au lendemain dans une situation financière précaire mettant en péril leur solvabilité ou plutôt, celle des copropriétaires, mais également afin que les syndicats ne se retrouvent pas dans une situation d’absence totale de volontaires pour administrer et gérer le bien commun.
En concluant, certains sujets qui nous apparaissent importants sont absents dans ce Projet de loi : que l’on pense aux modifications tacites, à l’obligation des modes alternatifs de règlement des conflits (médiation, arbitrage, conciliation), obligation qui permettrait de désengorger les tribunaux, d’assurer un traitement et un règlement efficace des différends qui peuvent exister en copropriété tout en préservant la relation personnelle de ses acteurs, aux copropriétés par phases, aux petites copropriétés etc. Lorsqu’on constate le temps que requiert un amendement à la loi, on ne peut qu’espérer que ces sujets soient ajoutés lors de son étude détaillée.
Comme je le disais dans ma chronique du printemps dernier, l’année 2019 marque le 50ème anniversaire de la copropriété au Québec. C’est l’occasion de célébrer la copropriété divise québécoise et d’accorder à ce mode d’habitation et secteur de l’économie québécoise toute la considération qu’il mérite compte tenu du rôle important qu’il joue en matière de développement urbain et vecteur économique pour notre société, pour celui des nombreuses familles et individus qui la composent. A notre avis, l’importance de la copropriété au Québec passe par une réforme législative cohérente, nuancée et respectueuse des droits et des capacités des individus qui la composent. A ne pas en douter, l’automne 2019 sera chaud.
Si vous avez des questions sur le contenu de la présente chronique ou sur tout autre sujet en lien avec la copropriété, incluant la médiation et l’arbitrage, n’hésitez pas à communiquer avec moi. Il me fera plaisir d’échanger avec vous.
Le beau temps semblant finalement s’installer, je vous souhaite à tous, chers lecteurs, chères lectrices, un très bel été et de reposantes vacances estivales !
1 « Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières »
2 Certaines dispositions n’entreront en vigueur que postérieurement, à des dates et échéances variées, en fonction des « règlements » que le gouvernement rédigera et adoptera en application de ces dispositions. Le gouvernement s’est donné jusqu’au 13 juin 2020 pour publier les « règlements ». Conséquemment, certaines dispositions de la Loi pourraient n’entrer en vigueur qu’en mars 2022.
3 Art. 2474 C.c.Q., Nadkarni c. SDC du 2237 Madison, 2014 QCCS 6231, SDC Verrières VI c. Maddalon, 2018 QCCS 2312.
4 Lorsque le montant de la perte est inférieur à celui de la franchise d’assurance.
5 Dont le recouvrement de la franchise d’assurance
6 Clause de médiation et d’arbitrage obligatoires contenue dans bon nombre de déclarations de copropriété.
7 Plus d’une vingtaine de firmes de gestion, de firmes d’avocats et de courtiers d’assurance.
8 www.ensemblecontre1074.com
9 Les soulignés dans toutes les citations de cette section sont les nôtres.
Ce texte est publié à titre informationnel uniquement et ne constitue pas un avis juridique.
Me Stefania Chianetta, avocate, arbitre et médiatrice accréditée (IMAQ)
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