Projet de loi 41, services judiciaires et solutions en temps de COVID-19
Revue CopropriétéPLUS, Printemps 2020
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photo de l'auteur Me Stefania Chianetta

 

Il y a à peine 2 semaines, je me suis demandé sur quoi porterait la présente chronique. Certes, le projet de loi 16(1) est entré en vigueur le 10 janvier dernier(2), mais il faut se le dire, nous commençons déjà à nous y habituer.

Il y a une dizaine de jours, le Québec a basculé dans la plus grosse crise sanitaire mondiale que la génération de mes parents, la mienne et celle de mes enfants auront connue jusqu’à présent. Du coup, il y a trop de choses dont je voudrais vous entretenir!

• Mesures préventives en copropriété, mesures d’isolement, retour des « snow birds », report des assemblées de copropriétaires, paiement des charges communes, mandat des administrateurs, report des travaux prévus. Que faire?

• Interruption des services judiciaires à travers la province : qu’en est-il des procédures judiciaires des syndicats de copropriété et/ou des copropriétaires qui sont en cours? Qu’en est-il de vos recours et des délais? Et surtout, que faire et à qui s’adresse-t-on en cas de conflit qui ne peut attendre le retour à la normale, dont nous ignorons la date, d’une situation sans précédent?

De plus, et alors qu’on s’y en attendait le moins, le 17 mars 2020, l’Assemblée nationale a adopté le Projet de loi 41 (PL-41), et sauf exceptions, la Loi concernant principalement la mise en œuvre de certaines dispositions des discours sur le budget du 17 mars 2016, du 28 mars 2017, du 27 mars 2018 et du 21 mars 2019 est entrée en vigueur le même jour.

Cette loi contient des dispositions qui concernent la copropriété divise, et plus spécifiquement les fiches descriptives des parties privatives et la modification de l’article 1074.2 C.c.Q., article qui aura fait couler beaucoup d’encre concernant l’assurance de copropriété et les sinistres causés par des copropriétaires et/ou leurs biens.

J’ai donc décidé de vous parler un peu de tout ça, simplement car « tout ça » fait et fera partie de votre quotidien et du mien pour les semaines à venir.
 

PROJET DE LOI 41(3)

Suite à l’entrée en vigueur du PL-41 le 17 mars 2020, l’article 1074.2 C.c.Q. portant sur les assurances en copropriété se lira dorénavant comme suit :

Article 1074.2 C.c.Q. : « Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que par leur contribution aux charges communes, sous réserve des dommages-intérêts qu’il peut obtenir du copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par sa faute et, dans les cas prévus au présent code, le préjudice causé par le fait ou la faute d’une autre personne ou par le fait des biens qu’il a sous sa garde.

Est réputée non écrite toute stipulation qui déroge aux dispositions du premier alinéa. »

(la modification est celle en caractères gras)

Il est trop tôt pour savoir si cette modification permettra de corriger complètement et définitivement la situation intenable qui a été créée par l’entrée en vigueur de cet article en décembre 2018. Reste aussi à voir l’interprétation qui en sera faite par les assureurs des copropriétaires, mais également ce qui pourra ou devra être fait pour toutes les réclamations des syndicats de copropriété qui ont été refusées par les assureurs des copropriétaires du 13 décembre 2018 au 17 mars 2020. Je continuerai de suivre ce sujet pour vous et j’aurai certainement l’occasion de vous en reparler d’ici peu.

Quant aux fiches descriptives des parties privatives, l’article 204 du PL-41, tel qu’amendé, prévoit ce qui suit :

« Le syndicat d’une copropriété divise établie avant le 13 juin 2018 qui n’est pas contrôlé par le promoteur doit soumettre pour approbation aux copropriétaires la première description des parties privatives prévue au troisième alinéa de l’article 1070 du Code civil.

Cette description doit, d’ici le 13 juin 2020, obtenir lors d’une assemblée l’approbation des copropriétaires, représentant plus de la moitié des voix des copropriétaires, présents ou représentés. »

(nos soulignés et caractères gras)

N’oublions pas que l’article 1070 C.c.Q., tel que modifié en décembre 2018 et janvier 2020, se lit comme suit :

Article 1070 C.c.Q. « Parmi les registres de la copropriété, le syndicat tient à la disposition des copropriétaires un registre contenant le nom et l’adresse postale de chaque copropriétaire; ce registre peut aussi contenir d’autres renseignements personnels concernant un copropriétaire ou un autre occupant de l’immeuble, si celui-ci y consent expressément. Ce registre contient également les procès-verbaux des assemblées des copropriétaires et du conseil d’administration, les résolutions écrites, le règlement de l’immeuble et ses modifications, ainsi que les états financiers.

Ce registre contient aussi la déclaration de copropriété, les copies de contrats auxquels il est partie, une copie du plan cadastral, les plans et devis de l’immeuble bâti ainsi que les certificats de localisation de l’immeuble s’ils sont disponibles, le carnet d’entretien, l’étude du fonds de prévoyance et tous autres documents et renseignements relatifs à l’immeuble et au syndicat ou prévus par règlement du gouvernement.

Ce registre contient enfin une description des parties privatives suffisamment précise pour que les améliorations apportées par les copropriétaires soient identifiables. Une même description peut valoir pour plusieurs parties lorsqu’elles présentent les mêmes caractéristiques. » (les soulignés sont les nôtres)

Bon nombre de copropriétés ont déjà adopté la 1ère description des parties privatives, ou elles s’apprêtaient à le faire au cours de leur assemblée générale annuelle qui devait avoir lieu ce mois-ci(4) . D’autres s’y préparaient, mais le processus n’était pas complété. En ces temps où on nous demande de nous isoler, d’éviter les contacts, que devrait faire le syndicat qui n’a pas encore pu faire approuver cette 1ère description?

Il est vrai que le moment choisi pour faire entrer en vigueur cet article, ou du moins le délai somme toute très court qui y est prévu, peut sembler inapproprié. À ce sujet, il faut comprendre que le PL-41 est un projet de loi omnibus concernant d’abord et avant tout des mesures fiscales ou de nature financière, et ne contenant que quelques dispositions en matière de copropriété divise. Le gouvernement de M. Legault, par l’entremise de son ministre des Finances, M. Éric Girard, avait besoin de mettre rapidement en vigueur ces mesures fiscales vu la crise actuelle qui nous secoue.

Cela dit, d’une part, le 13 juin 2020 c’est bientôt, très bientôt. D’autre part, nous vivons une situation exceptionnelle, sans précédent, et il est trop tôt pour savoir combien de temps durera cette crise sanitaire. Nous n’en sommes qu’au début et tout semble indiquer que la fermeture de tous les commerces(5) sera annoncée bientôt, tout comme la prolongation de la fermeture des établissements scolaires encore pour quelques semaines. Malheureusement, il est encore trop tôt pour déterminer avec certitude ce qu’il conviendra de faire. Il sera donc important de suivre l’évolution des évènements.

Entre-temps, une chose est sûre : les rassemblements sont interdits, l’isolement volontaire, quelquefois forcé, est de mise plus que jamais. Les assemblées de copropriétaires ne devraient pas avoir lieu et devraient être reportées. Il ne s’agit pas d’une urgence telle qu’il faille contrevenir aux restrictions et demandes gouvernementales qui nous sont adressées. Il en va de la sécurité et de la santé de tous les copropriétaires et occupants de l’immeuble et de leurs familles.

Le cas échéant, si la situation actuelle devait perdurer des mois, je suis d’avis que le contexte social et sanitaire exceptionnel que nous vivons à l’échelle planétaire pourrait être considéré comme étant un motif équivalant à une impossibilité d’agir dans le délai indiqué.

Le contexte ne vous empêche toutefois pas de réaliser toutes les étapes préalables nécessaires. Ainsi, sans tenir d’assemblée, vous pourrez demander aux copropriétaires que les documents nécessaires ou manquants vous soient transmis par courriel. Vous pourriez également consulter les copropriétaires sur ces fiches par courriel, ou par visioconférence. Bien qu’une telle consultation soit informelle et qu’elle ne puisse remplacer l’assemblée requise, elle vous permettra néanmoins de bénéficier d’avance des commentaires des copropriétaires au sujet des fiches et d’apporter les modifications requises, s’il en est. Une fois que la situation sera revenue à la normale, il ne vous restera qu’à convoquer l’assemblée pour approuver le tout.

Ainsi, sans aucunement réduire l’importance que vous devriez accorder à cette disposition, je suis personnellement d’avis que les syndicats de copropriété et les copropriétaires ont présentement à faire face à des enjeux sanitaires, individuels et collectifs, qui sont prioritaires, et c’est sur ces enjeux prioritaires que je vous invite surtout à vous concentrer pour le moment. Ultimement, en cas de besoin, l’assemblée pourra toujours être organisée et tenue par voie de procurations, par des moyens technologiques (Facetime, Skype, visioconférence etc.) et même, pour les plus petites copropriétés, par voie de résolution écrite unanime.
 

COVID-19(6)

La crise sanitaire que nous vivons fait en sorte que les syndicats de copropriété, leurs administrateurs, leurs gestionnaires et les copropriétaires sont confrontés à une situation qu’ils n’ont jamais vécue et, disons-le, probablement jamais envisagée. Vous direz que je radote, mais je le dis depuis toujours : une copropriété est une micro-société, un microcosme. Et qui dit société dit contacts. Si la société civile s’est dotée de mesures préventives, la société qu’est la « copropriété » doit en faire autant.

Nous avons recommandé à tous nos clients et partenaires, dès le 13 mars dernier, de prendre immédiatement certaines mesures préventives :

- Installation de distributeurs de désinfectant dans les halls d’entrée, dans les couloirs, près des casiers postaux, au garage, entre autres;

- Nettoyage fréquent de toutes surfaces, équipements ou composantes susceptibles de devenir un secteur de contamination : poignées des portes, robinets, chasses d’eau, casiers et boites postales, boutons d’ascenseur, écrans de sélection des unités, intercoms, téléphones, bureau de l’administration ou boite pour l’administration etc.;

- Fermeture des piscines, gymnases, spas et autres installations communes semblables(7) ;

- Affichage, dans les parties communes, des consignes sanitaires émises par Santé Canada ou autres organismes sanitaires(8);

- Report de toute assemblée générale des copropriétaires;

- Tenue des réunions du conseil d’administration par voie téléphonique ou par moyen technologique;

- Utilisation encadrée des ascenseurs (nombre de personnes, utilisation etc.);

- Communication efficace et fréquente avec les copropriétaires et les occupants de l’immeuble, afin de leur fournir des informations utiles et les tenir à jour sur les mesures et restrictions imposées par le gouvernement et celles imposées par le conseil d’administration du syndicat(9).

Ce ne sont là que quelques-unes des mesures que je suggère au moment de rédiger ces lignes. Tout porte à croire que d’autres s’ajouteront au cours des prochains jours, des prochaines semaines, la situation évoluant sans arrêt.

Qu’en est-il des parties communes? Que convient-il de faire face aux isolements imposés? Face aux résidents qui rentrent au bercail après avoir passé quelques semaines sous des cieux plus cléments? Comment se comporter face aux copropriétaires qui se mettent en isolement volontaire? Et que faire si des copropriétaires ou des résidents ont plus de 70 ans?

Ce sont des questions tout à fait pertinentes puisque comme je le disais plus tôt, les parties communes de l’immeuble peuvent potentiellement devenir un foyer d’infection, un vecteur de contamination. À proprement parler, les parties communes ne sont pas des lieux publics. Cela dit, ce sont des espaces, des composantes, des lieux qui appartiennent à tous les copropriétaires, des lieux dans lesquels les copropriétaires, pris dans leur ensemble, sont en droit de se sentir en sécurité, à l’abri d’une menace de contamination.

Dans les circonstances que nous connaissons, l’intérêt collectif devrait à mon avis primer par rapports aux intérêts individuels. Les copropriétaires, occupants, résidents qui sont ou devraient être en isolement imposé ne devraient pas circuler dans les parties communes de l’immeuble, pas plus que les personnes à qui le gouvernement demande de demeurer chez elles, incluant les personnes âgées de plus de 70 ans. Quant aux occupants asymptomatiques, qui n’ont pas voyagé et qui ne sont pas en contact avec une ou des personnes mentionnées ci-dessus, la circulation dans les zones de passage et les aires communes devrait être encadrée et limitée aux seules entrées et sorties pour se rendre au travail, à l’épicerie et/ou à la pharmacie, ou en cas d’une urgence, il va sans dire. Tout autre passage dans les parties communes devrait être évité, afin de réduire le risque pour tous, incluant les administrateurs, le personnel de gestion, le concierge etc.
 

Fonctionnement de la copropriété, mandat des administrateurs, budget et paiement des charges communes:

Bien que tout soit ralenti et que je vous recommande de reporter vos assemblées de copropriétaires, il n’en demeure pas moins que les copropriétés doivent continuer à fonctionner, continuer à percevoir les charges communes, et ce afin d’être en mesure de rencontrer leurs obligations quant à la conservation et l’entretien des immeubles.

En ce qui concerne le mandat des administrateurs, les déclarations de copropriété stipulent, généralement, que le mandat des administrateurs est prolongé jusqu’à la tenue de l’assemblée générale annuelle suivante. Conséquemment, même s’il est indiqué que la durée du mandat des administrateurs est d’un (1) an, les administrateurs qui sont en poste le demeureront jusqu’à la prochaine AGA.

Advenant la démission d’un administrateur, la plupart des déclarations de copropriété permettent aux administrateurs en poste (s’ils ont le quorum) de combler les vacances, c’est-à-dire de désigner un remplaçant jusqu’à la prochaine AGA.

Pour ce qui est du budget de la copropriété et des cotisations mensuelles, ils sont maintenus tels quels jusqu’à la prochaine assemblée générale annuelle, lors de laquelle il sera procédé à la consultation sur le nouveau budget. Les ajustements rétroactifs seront faits suite à la consultation sur le nouveau budget. Nécessairement, tout porte à croire que les budgets à venir tiendront compte de la crise que nous vivons actuellement et des dépenses supplémentaires qui auront été engendrées par celle-ci.

Les copropriétaires doivent continuer à payer leurs charges communes régulièrement et à temps. La Covid-19 ne signifie pas un congé ou une suspension du paiement de vos charges communes, à moins que le gouvernement du Québec n’intervienne directement à ce sujet, ce qu’il n’a pas fait au moment d’écrire ces lignes. Le syndicat doit être en mesure de percevoir ces charges pour pouvoir rencontrer ses obligations financières (assurances, suggère électricité, entretien etc.).

Afin d’éviter la manipulation d’effets bancaires, le recours à un système de paiements préautorisés parait être la solution appropriée. Pour les autres, le paiement devrait se faire par chèque, dont le dépôt devrait se poursuivre comme d’habitude, le premier jour du mois.

Dans les circonstances que nous connaissons et avec les conséquences sur le marché du travail, il est possible que certains copropriétaires éprouvent des difficultés à acquitter la totalité de leurs charges communes. Si c’est le cas, nous invitons ces copropriétaires à faire preuve de la plus grande transparence avec le conseil d’administration du syndicat, à le prévenir le plus rapidement d’un possible défaut de paiement, et à prendre entente avec le conseil d’administration en vue dudit (desdits) paiement(s). Si vous êtes administrateur, nous vous invitons à tenir compte des situations particulières qui pourront vous être adressées, et à faire preuve de souplesse et de flexibilité à l’égard de telles situations pendant quelques semaines.

Quant aux réunions du conseil d’administration, tel que je le mentionnais plus tôt, elles peuvent facilement être tenues par voie téléphonique, par visioconférence, ou par autre moyen technologique. Une résolution écrite signée par tous les administrateurs, ou un courriel de chacun d’eux confirmant son accord à une proposition, peut également tenir lieu de réunion du conseil d’administration. En tout état de cause, le conseil d’administration doit continuer à prendre les décisions nécessaires concernant l’entretien et la conservation de l’immeuble

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ET NOS COPROPRIÉTAIRES PLUS ÂGÉS DANS TOUT CELA?

Des situations graves comme celle que nous vivons présentement nous amènent inévitablement à nous questionner; elles nous ramènent à certaines valeurs qui ont tendance à céder le pas avec la vie frénétique qu’est la nôtre habituellement.

L’entraide et la solidarité sont de mise. Si certains copropriétaires ou résidents sont âgés ou limités dans leurs déplacements, s’ils ne peuvent sortir, je ne peux que vous encourager à faire preuve de solidarité, d’empathie, d’autant plus qu’ils sont présentement probablement également coupés de contacts physiques avec leur famille.

Si vous vous rendez à l’épicerie et/ou à la pharmacie, demandez-leur s’ils ont des besoins, demandez-leur qu’ils vous préparent une liste d’achats que vous pourrez faire pour eux et que vous pourrez laisser à leur porte, communiquez par téléphone avec eux afin de prendre des nouvelles, de vous assurer qu’ils ont le numéro de leur pharmacie en cas de besoin, qu’ils savent qu’ils peuvent renouveler leurs prescriptions par téléphone et se les faire livrer.

L’histoire regorge de témoignages de la beauté de la solidarité et de l’entraide dans les communautés dans des situations comme celle que nous vivons.
 

Interruption des services judiciaires et justice à distance :

Compte tenu des demandes gouvernementales visant à protéger la santé publique, les services judiciaires sont interrompus depuis le 13 mars dernier, et seules les affaires urgentes(10) sont entendues.

Les délais de procédure civile devant les tribunaux judiciaires, de prescription extinctive et de déchéance sont suspendus depuis le 13 mars 2020 par l’arrêté 2020-4251 de la ministre de Justice et de la juge en chef du Québec. Ceux pour introduire des recours devant certains tribunaux administratifs le sont depuis le 20 mars 2020, par le décret 222-2020

Nous avons reçu beaucoup de demandes à ce sujet depuis. Qu’arrive-t-il avec notre dossier? Nous avions une audition bientôt, aura-t-elle lieu? Qu’arrive-t-il avec le recours que nous étions sur le point d’intenter? Qu’arrive-t-il avec les différends que nous vivons dans notre copropriété? Que fait-on si l’on fait face à un différend ou à un litige au cours des prochaines semaines?

Les dossiers judiciaires qui sont présentement en cours sont suspendus. Leur cours reprendra lorsque les services judiciaires seront remis en fonction, une fois que les autorités jugeront que la situation sera rétablie.

Si vous étiez sur le point d’intenter des procédures judiciaires, notamment en raison de l’arrivée imminente de la fin d’un délai de prescription, sachez que les délais sont suspendus. Conséquemment, vous ne subissez pas de préjudice et il vous faudra intenter votre recours lorsque les services judiciaires reprendront. Quant à la signification de procédures par huissier, la signification est devenue très complexe en raison de la fermeture de beaucoup de sociétés, commerces, institutions etc.

Ceux qui me connaissent ou me suivent connaissent l’importance que j’accorde aux modes alternatifs de résolution des conflits, surtout dans un contexte tel que la copropriété. Je vous ai déjà entretenus au sujet de l’arbitrage et de la médiation en copropriété à quelques reprises et je vous réfère à mes précédentes chroniques pour en apprendre davantage(11).

Le recours à l’arbitrage pour régler des conflits est déjà très bien établi en copropriété. Depuis quelques années, plusieurs déclarations de copropriété contiennent des dispositions prévoyant un recours obligatoire à l’arbitrage en cas de conflit, à l’exclusion des tribunaux. Pour les syndicats dont la déclaration est muette à ce sujet, le recours à l’arbitrage peut toujours être convenu de façon consensuelle, c’est-à-dire si les parties y consentent au moment où le différend nait. Ce mode de résolution des différends me semble plus que jamais à privilégier dans le contexte de crise actuel.

Le recours à l’arbitre se prête bien à presque toutes les situations, incluant celles visant à obtenir une décision ordonnant le respect d’une des dispositions de la déclaration de copropriété. Il permet de débloquer des différends ou des situations conflictuelles ou d’interprétation qui risquent de paralyser la copropriété, ou encore son administration. L’arbitrage est un processus similaire au processus judiciaire, mais simplifié et de loin plus rapide que le recours judiciaire traditionnel.

En plus d’être nettement plus économique, il permet une adaptation personnalisée aux faits d’espèce de chaque dossier, sans compter qu’il se déroule dans un climat convivial, moins protocolaire que celui auquel sont confrontés les participants devant les tribunaux traditionnels. Ceci constitue un autre point positif d’un tel recours.

Le processus d’arbitrage permet d’obtenir une décision arbitrale finale et sans appel rapidement, à moindres coûts et dans le respect des directives et recommandations gouvernementales concernant l’interdiction de rassemblements et la distanciation sociale.

Comme le dit si bien Me Grondin, le Bâtonnier du Québec, « les crises sont souvent des catalyseurs de changement profonds, rapides et positifs ». Conséquemment, si vous n’avez pas accès aux palais de justice pour au moins quelques semaines, voire quelques mois, j’ai voulu m’assurer que les syndicats de copropriété et les copropriétaires puissent continuer à préserver et à défendre leurs droits, que vous puissiez avoir accès à la justice, autrement.

C’est animée de cette passion et de ces convictions profondes et, disons-le, motivée par une légère audace, que je vous annonce que mon cabinet et le cabinet De Grandpré Jolicoeur avons travaillé à mettre en place les structures nécessaires pour vous faciliter le recours à des arbitres spécialisés en copropriété divise et indivise, sans que vous ayez à sortir de votre domicile, sans que vous ayez à vous déplacer.

Ainsi, au moins pendant tout le temps que durera la crise sanitaire, et qui sait peut- être même après celle-ci, les mandats d’arbitrage qui sont déjà en cours et tous ceux qui me seront confiés se déroulement virtuellement, par voie d’une plateforme de visio-conférence permettant le partage de documents et d’informations en temps réel entre les participants à l’arbitrage , permettant que les témoignages et les plaidoiries soient faits « live », virtuellement, via cette plateforme.

Je vous invite à communiquer avec moi si un tel service vous intéresse ou si des informations additionnelles ou des précisions à ce sujet vous étaient nécessaires.

À ne pas en douter, il y aura un avant et un après Covid-19. À mon avis, les choses ne seront plus jamais vraiment pareilles : des structures se seront mises en place, beaucoup d’entreprises auront équipe leur personnel de portables et se seront dotés de l’infrastructure nécessaire pour permettre la connexion et le travail à distance, le télétravail aura pris de l’importance, certains d’entre nous auront réalisé les impacts humains et environnementaux des innombrables heures passées dans la circulation urbaine, des entreprises s’interrogeront sur la pertinence d’occuper et de payer pour des bureaux d’une superficie impressionnante, pas toujours essentielle. Je nous souhaite, en tant que société, que cette crise que nous traversons tous ensemble nous permettra d’évoluer positivement sur tous les aspects.

Sur ce, chers lecteurs, chères lectrices, il ne me reste qu’à vous recommander d’être prudents, de prendre soin de vous, de vos familles, de vos êtres chers. C’est tout ce qui compte. Bon printemps!


1 Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l’amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d’habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal.
2 Sauf exceptions.
3 Loi concernant principalement la mise en œuvre de certaines dispositions des discours sur le budget du 17 mars 2016, du 28 mars 2017, du 27 mars 2018 et du 21 mars 2019
4 En mars 2020 car bon nombre de copropriétés ont un exercice financier qui se termine au 31 décembre de chaque année
5 Sauf commerces essentiels comme les épiceries et les pharmacies
6 Les recommandations qui suivant sont de nature générale et nous vous demandons de consulter régulièrement les directives, consignes et recommandations émises quotidiennement par les différents paliers gouvernementaux, ainsi qu’à ne pas hésiter à consulter les professionnels appropriés selon les circonstances de votre copropriété.
7 Il est toutefois nécessaire de continuer à les entretenir
8 Voir les affiches et pamphlets disponibles en ligne à ce sujet
9 Attention à préserver la confidentialité des informations que vous détenez à propos des copropriétaires et des résidents, incluant et surtout quant à leur état de santé (sauf si consignes expresses autres de la part des autorités)
10 Et on parle d’urgence réelle et objective.


Ce texte est publié à titre informationnel uniquement et ne constitue pas un avis juridique.

Me Stefania Chianetta, avocate, arbitre et médiatrice accréditée (IMAQ)
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